Tout comme le concours « Miss Kabylie », le « Salon National Djurdjura du Couscous » est désormais l’incontournable des festivités organisées dans le cadre du nouvel an berbère à Tizi Ouzou. Ce n’est pas un hasard, le couscous est le plat par excellence de ce nouvel an.
Dans le temps, on puisait de la basse-cour (il n’y avait pas une maison sans basse-cour), un coq de préférence qu’on égorgeait pour accompagner ce couscous. On accueillait également la nouvelle année en blanchissant, symbole de propreté et de pureté, les murs de la maison avec du kaolin (tumlilt), qu’on mélangeait avec de l’eau. Autre rituel, on changeait les trois pierres qui entouraient le kanoun (foyer), sur lesquelles était posée la marmite, pour que la nourriture soit plus bonne et prolifique pour l’année à venir.
Le couscous (seksu en kabyle) est un plat d’origine berbère, donc d’Afrique du Nord. Il est apparu bien avant le 9ème siècle. Des ustensiles (notamment le couscoussier) découverts lors de fouilles archéologiques et servants à la préparation de ce plat l’attestent … Seksu a fait du chemin depuis. Il est universellement reconnu et apprécié, c’est un plat complet. Il reste le plat national dans les pays d’Afrique du Nord, et le 2ème plat préféré des Français. Le couscous a gardé son caractère mystérieux, du fait de son histoire quelque peu controversé
Pour en revenir à ce 3ème salon qu’à abrité la maison de la culture Mouloud Mammeri, il s’est étalé sur 3 jours (du 11 au 13 janvier). Au menu, une exposition des variétés de couscous par des fabricants (El Gherbal, Couscous berbère, Couscous Frikat) et des femmes venues de plusieurs wilaya (Alger, Constantine, Khenchela, Aïn Témouchent, Djelfa, Ouargla, Blida, Bouira, Béjaïa, Tizi Ouzou). Le 12 janvier à midi, le nombreux public a eu à déguster ces mets préparés sur place par les délégations, et découvrir ainsi seksu des autres régions d’Algérie. Haddadou Md Akli et Abdenbi Houria, tous deux enseignants au département de Tamazigh à l’université de Tizi Ouzou, ont animé deux conférences au petit théâtre. L’une a porté sur les « Traditions culinaires à Yennayer » et l’autre « Le repas de Yenneyer dans une économie de subsistance ». Le groupe de jazz « Alf », venu de Marseille a clôturé le salon par un concert à la grande salle.
Le reste de la Kabylie n’était pas en reste pour célébrer l’année 2960. A Béjaïa-ville comme partout dans la wilaya, la journée du 1er Yenneyer (qui correspond au 12 janvier) fut riche en activités: semaine culturelle, théâtre, cinéma amazigh, concours de cuisine, conférences- débats et galas étaient au menu.
A Boumerdes fut projeté en avant première le film « Thidhet Yefren » (La vérité cachée), de Rachid Aïchou. C’est l’histoire très émouvante d’une veuve qui « perd » son fils unique de 2 ans… Dans la même wilaya à Aït Amrane, s’est tenue à l’occasion la foire de l’huile d’olive qui a accueilli des producteurs venus de Tizi Ouzou, Béjaïa, Bouira, Boumerdes et Blida. Les organisateurs de cette 1ère foire comptent bien la pérenniser en demandant qu’elle soit institutionnalisée.
C’est à Bordj Bou Arreridj (complexe culturel) que le Haut Commissariat à l’Amazigité (HCA) a élu domicile pour les festivités officielles de cette année, après plusieurs autres villes du pays. Le HCA compte ainsi toucher toutes les régions d’Algérie pour faire découvrir les richesses et le sens de Yenneyer. Expositions d’art culinaire et artisanal, conférences animées par Aziri et Chemakh de l’université de Tizi Ouzou et gala artistique étaient au programme. L’Hachmi Assad du département culture du HCA a déclaré à l’occasion que « L’Amazighité ne doit pas se limiter à la pratique d’une langue. Elle doit s’étendre à l’appropriation de notre identité et de notre culture que l’Etat doit prendre en charge… ». Pour sa part, le secrétaire général a appelé les pouvoirs publics « à faire de cette journée une fête nationale, puisqu’elle l’est de fait, il ne reste que le texte réglementaire.».
Enfin, à Bouira, les festivités avaient un caractère officiel. La maison de la culture Ali Zammoum a abrité des expositions, des pièces de théâtre, projections de films amazigh, gala artistique, durant 3 jours.
Force est de constater que les mouvements qui revendiquaient haut et fort une journée fériée pour Yenneyer ainsi que bien d’autres chose, étaient absents sur le terrain. Seul le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie (MAK) s’est manifesté. Les étudiants de Tizi Ouzou et Béjaïa comme il est de coutume depuis trois ou quatre ans, ont marché ce 12 janvier. Selon le MAK, des leaders du mouvement ont été arrêtés la veille, certains ont été relâchés mais d’autres (8 selon le MAK) n’ont pas encore donné signe de vie.
Par Mus