Larbâa Nath Irathen est une commune de Kabylie, dune superficie de 39 km² pour 29 000 habitants. Le plus grand village de Kabylie « Taourirt Mokrane », y est inclus.
Culminant à une altitude de 927m, la ville de LNI est située à 27 Km au sud de la ville de Tizi Ouzou. Deux versions s’opposent quant à l’origine de l’appellation « Larbâa Nath Irathen ». Larbâa venant du chiffre 4 en arabe, la première reviendrait au marché hebdomadaire du mercredi (4e jour de la semaine). Quant à la seconde, elle est en rapport avec les 4 tribus qui composaient la région : At Akerma, les At Irjen, les At Ousammer et les At Oumalou (Rebâa Nath Iraten). Le mot Irathen signifie lions en berbère, en référence au passé guerrier de la population.
A la conquête française de l’Algérie, cette région fut la dernière à se soumettre. L’accès y était très laborieux, et la résistance des indigènes très tenace. Mais en mai 1857, le Maréchal Randon vint prendre le commandement des troupes à Tizi-Ouzou. Les combats furent alors acharnés et la résistance des autochtones, menés par le Cheikh Seddik Arab, des plus farouche. Ce qui a fait dire à Randon, que le Cheikh était « la tête et le bras des Beni-Raten ». Les Beni-Iraten moins armés finirent par plier. Le Maréchal décida alors d’élever un fort en plein massif de Kabylie, à la fois dominant et stratégique. Le lieu idéal étant celui où était implanté le village Icherîwen, il le fit raser pour construire, ce qui allait devenir Fort Napoléon. Il fallait aussi construire une route, pour mettre en relation le fort et la ville de Tizi-Ouzou. Ce qui fut aussitôt entamé par le génie militaire. Des colons furent ramenés, et une petite ville naquit alors à proximité du fort. A partir du 11 septembre 1871, Fort Napoléon devint Fort National. Depuis l’indépendance, la ville est communément appelée Larbâa Nath Irathen (LNI), même si la précédente appellation subsiste toujours.
Les choses ont bien changé aujourd’hui, à Larbâa Nath Irathen. Le fort est réduit à néant et les anciennes maisons ont laissé place à de nouvelles constructions gigantesques. Rien d’étonnant, quand on sait, que la région est caractérisée par une forte émigration.
La capitale des chemins qui montent, a su conserver quelques traditions. On citera la fête des cerises, célébrée chaque année au début de l’été. Malheureusement les cerisiers sont entrain de dépérir sans être renouvelées. Thasewiqth (jour précédant l’Aïd), une tradition qui a disparu ailleurs, est encore d’actualité à Larbâa Nath Irathen. Les enfants sont accompagnés de leur père ou de leur grand- père pour aller au souk (marché). Taachourth (L’Achoura) est aussi dignement fêtée, elle draine chaque année la grande foule. Idhebbalen (troupes folkloriques) sont toujours conviés à l’occasion, notamment aux mausolées de Sidi h’nd Awanou et Sidi Youcef. Il y a aussi la chasse, qui représente l’activité préférée des hommes de la région. A l’occasion, les chasseurs se réunissent et s’organisent de manière rigoureuse pour traquer le gibier. A cet effet, les chiens sont choisis puis dressés par une main professionnelle. Il faut préciser, que la chasse dans cette région, obéit à des règles d’éthique des plus strictes. Le sanglier, le lièvre et la perdrix rouge, sont chassés de la mi-septembre à la fin décembre.
Les femmes de la région, ont de leur coté préservé un art ancestral, Azetta (tissage de tapis). La transmission se fait de manière orale et informelle, de génération en génération. Une coopérative de broderie et de confection, crée par FEDA (femmes et développement en Algérie) existe, les adhérentes ambitionnent même, de créer tout un réseau, pour l’apprentissage de la broderie berbère traditionnelle. En parlant de femmes, beaucoup d’entre elles, notamment celles des villages environnants, préfèrent accoucher à domicile. Elles continuent à faire confiance à ces vieilles femmes chevronnées, de l’ancienne génération.
Cependant, cette magnifique ville de Kabylie et les villages qui l’entourent, souffrent d’un taux élevé de chômage. Les villages de la commune se vident, et cet exode commence à inquiéter. Les projets de développement, se font au ralenti. Plusieurs d’entre eux ont été remis au placard, souvent faute de foncier. Les fléaux, qui en découlent sont nombreux : drogues, vols… La pauvreté gagne du terrain. Plusieurs familles de Larbâa Nath Irathen, auraient régulièrement recours aux aides des associations caritatives. Un seul projet a enthousiasmé la population, il s’agit du jumelage de la ville avec la municipalité de Saint- Denis, en 1998. Les échanges furent interrompus lors des événements de 2001, avant de reprendre en 2006.
Même l’infrastructure culturelle est en de ça des souhaits des jeunes. La salle de cinéma de la ville, qui servait aussi pour les spectacles (théâtre, galas), est à l’abandon et dans un état de délabrement avancé.
Notons aussi qu’il existe une communauté chrétienne assez importante. Seulement les conditions dans lesquelles elle accomplit son culte, sont des plus déplorables. Les prières et les fêtes se tiennent dans un hangar loué, faute de place dans l’église de la mission méthodiste.
Larbâa nath Irathen est connu surtout pour avoir donné de grands hommes. Il y a Si Muhend U M’hend, le grand poète kabyle dont les Isefras (poèmes) ont été transmis oralement de génération en génération. Il y a aussi Abane Ramdane, la tête pensante du FLN, l’artisan du congrès de la Soummam. Nous n’omettrons pas de citer le bédéiste Haroun Ahmed, le créateur du célèbre personnage M’Quidech.